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07 mai 2013

Développement professionnel et planification

Référence :

Frost, J. A., Akmal, T. T., et Kingrey, J. U. (2010). Planning teacher professional development: the struggles and successes of an inter-organizational collaboration, Professional Development in Education, 36(4). 581-595.

Concepts associés au développement professionnel :

Le développement professionnel est associé au concept de collaboration :
La collaboration est souvent perçue comme un moyen de favoriser le développement professionnel des enseignants, notamment par le biais de communautés d’apprentissage afin d’aider les enseignants à améliorer leur pratique (McLaughlin et Talbert, 2001; Cobb et al., 2003, Nelson et Slavit, 2007).
La collaboration entre les organisations (par exemple entre les écoles et les universités) est également souvent encouragée, voir même exigée lors de l’octroi de certaines subventions pour le développement professionnel.
« By working together, partners with different connections and perspectives are seen as having the potential to accomplish goals- such as broad educational reform- that the individual people or institutions could not achieve alone.”(p. 582).Lorsque les deux parties s’apportent des bénéfices mutuels, la psychologie organisationnelle parle d’avantage collaboratif (collaborative advantage) (Kanter, 1994; Huxham, 1996; Huxham et Vangen, 2000). Par contre,  lorsque ce n’est pas le cas, la collaboration peut mener à l’inertie (collaborative inertia).
Cette inertie peut provenir de plusieurs causes :
-          Enseignants résistants ou lents à participer à l’apprentissage réflexif, puisqu’habitués à travailler de manière isolée.
-          Groupes qui contribuent volontairement ou non à faire en sorte que les enseignants n’examinent pas leur pratique et n’apportent pas de changements quant à leurs croyances
-          Difficulté à établir un objectif commun compatible avec les buts de chacune des organisations impliquées
-          Difficulté à établir une confiance mutuelle entre les organisations
Le développement professionnel est associé au concept de changement :
Selon Fullan et Miles (1992), il existe deux niveaux de changements : changements de premier ordre (superficiels) et changement  de second ordre (culturel et systémique). Le second type implique une réflexion profonde et peut engendrer des difficultés, comme cela a été le cas dans l’exemple présenté dans ce texte.

Éléments méthodologiques :

Dans le cadre de cette étude qualitative, les auteurs ont analysé l’expérience d’un groupe inter-organisationnel de développement professionnel en mathématiques. La psychologie organisationnelle a été utilisée afin d’analyser les défis rencontrés et l’évolution du groupe à travers le temps. Le groupe collaboratif réunissait 8 membres, soit des enseignants du secondaire et du post-secondaire, de River City, une ville du Nord-Ouest des États-Unis, ainsi que des représentants du district scolaire et de deux universités. L’objectif du groupe était d’apprendre comment mieux soutenir les élèves lors de la transition des cours de mathématiques de l’école secondaire vers les cours du post-secondaire. Les trois auteurs sont à la fois participants et chercheurs (observateurs) dans le cadre de ce groupe. Les données analysées comprennent : journal rétrospectif des trois auteurs, documents écrits reliés au projet et entrevue avec les autres membres du groupe à la fin de l’année.

Résultats :

Le groupe collaboratif s’est avéré une expérience positive mais il y a eu plusieurs difficultés rencontrées en cours de route.
Attentes quant au rôle :
Les efforts inter-organisationnels peuvent être affectés par l’ambigüité des rôles des différents acteurs. Notamment, trois des membres à l’origine du groupe croyaient qu’ils auraient un rôle de leaders à adopter et ont donc été surpris quant certains autres membres ont pris en charge ce rôle. Une autre participante souligne qu’elle aurait préféré agir seulement à titre d’observatrice au sein du groupe mais que sa direction l’a incitée à participer plus activement. Elle ne se sentait pas appuyée car elle manquait de temps pour jouer ce rôle et certains membres du groupe critiquaient son travail.
La littérature scientifique souligne qu’une des premières préoccupations lors de la formation d’un groupe collaboratif est le rôle que chacun des membres doit jouer (Schein, 2004). « According to organizational researchers, these types of confusion about roles can occur in situations in which members of a group hold overlapping or conflicting goals (Rizzo et al., 1970; Reese & Sontag, 2001), little group socialization has occurred (Reese & Sontag, 2001; Jaskyte, 2005) and members do not feel their strengths are valued (Jaskyte, 2005). »
Dans le présent groupe, les membres ont eu peu de temps avant la première session de travail pour discuter au préalable de leurs objectifs et de leurs rôles et développer une vision commune. Une telle ambigüité quant au rôle à jouer par les membres peut engendrer insatisfaction, manque de soutien et manque d’investissement au sein du groupe (Ilgen & Hollenbeck,1991; Yun et al., 2007), voire même la décision de quitter le groupe (Ilgen & Hollenbeck, 1991; Jehn, 1997). En outre, si les rôles sont ambigus, l’efficacité du groupe est compromise et des tensions se créent entre les membres. Les recherches sur l’investissement quant à l’emploi soulignent que l’individu est davantage porté à s’investir s’il a une certaine autonomie, qu’il comprend son rôle et qu’il est satisfait de son travail. Dans le cas du groupe collaboratif, certains membres ont été portés à se désinvestir. Par exemple, un des membres a arrêté d’assister aux sessions de travail), parce qu’il n’avait pas l’impression d’être utile pour le groupe.
Attentes quant au processus :
Au départ, les différents membres du groupe n’avaient pas la même vision quant au travail à réaliser. Par exemple, Kate (une des membres) voyaient le groupe comme un forum pour les enseignants afin de construire des relations d’apprentissage collaboratives et de miser sur le développement professionnel, alors que John (un autre membre), voulait que le groupe prenne de l’expansion et devienne un modèle de collaboration entre partenaires du secondaire, du collégial et de l’université. Ainsi, dans ce groupe collaboratif, les membres ont eu de la difficulté à établir un objectif commun, notamment en raison des différences entres les cultures organisationnelles, ce qui peut amener, selon la littérature scientifique, à une inertie collaborative (Huxham & Vangen, 2000; Reese & Sontag, 2001). Afin de surmonter cette difficulté, il est essentiel que les membres fassent un effort conjoint afin de comprendre, de reconnaître et de respecter les perspectives et la culture organisationnelle d’autrui, et d’intégrer ces différentes perceptions au sein d’une nouvelle perspective collaborative. Il s’agit de faire en sorte de développer un langage commun et une vision commune du travail à réaliser.
« If the group finds a way to value the varying skills and perspectives of the members, particularly through discussions that explore the different viewpoints, the diversity of the group can lead to more productive and original outcomes than that of groups with more homogeneity (Arnason & Schweiger, 1997). »
Résultats du groupe :
Au fil du temps, le groupe est parvenu à une meilleure cohésion. Même si des différences subsistent quant aux perceptions des membres rattachés au secondaire ou au collégial, on note une augmentation de la confiance mutuelle, une meilleure compréhension de la perspective d’autrui et une plus grande satisfaction des membres.  Néanmoins, John (un des participants), a une vision moins positive des résultats du groupe en indiquant que, même si c’est une première étape intéressante quant au développement de la collaboration inter-organisationnelle, il aurait souhaité que le groupe prenne de l’expansion et s’agrandisse, ce qui n’a pas été le cas.
Les chercheurs concluent en indiquant que les difficultés vécues par le groupe auraient pu être évitées si le groupe avait pris le temps au préalable d’explorer les différentes perspectives, de reconnaître les forces et de clarifier les rôles de chacun  (Rizzo et al., 1970; Jaskyte, 2005). Néanmoins, selon les recherches portant sur les difficultés d’effectuer des changements systémiques (Fullan et Miles, 1992) et sur l’importance de l’inertie collaborative (Huxham, 1996; Huxham & Vangen, 2000; Vangen & Huxham, 2003),  le processus aurait tout de même été difficile pour les enseignants. Il est donc important d’informer dès le départ les membres d’un groupe inter-organisationnel quant aux difficultés qu’ils peuvent rencontrer et de leur offrir suffisamment de temps pour qu’ils puissent régler ces difficultés au fur et à mesure qu’elles apparaissent. En effet, la confiance et la vision commune sont des éléments qui se développent au fil du temps.
Ainsi, cette étude révèle l’importance de « planifier la planification », c’est-à-dire de prendre du temps, au début du processus, afin d’articuler les perspectives de chacun des membres et de développer une vision commune quant au travail à réaliser.

Références citées :

  • Arnason, A. C. & Schweiger, D. M. (1997) The effects of conflict on strategic decision making, effectiveness, and organizational performance, in: C. K. W. De Dreu & E. Van de Vliert (Eds) Using conflict in organizations (Thousand Oaks, CA, Sage), 101–115.
  • Cobb, P., McClain, K., Lamberg, T. dS. & Dean, C. (2003) Situating teachers’ instructional practices in the institutional setting of the school and district, Educational Researcher, 32(6), 13–24.
  • Fullan, M. & Miles, M. B. (1992) Getting reform right: What works and what doesn’t, Phi Delta Kappan, 73(10), 744–752.
  • Huxham, C. (1996) Advantage or inertia? Making collaboration work, in: R. Paton, G. Clark, G. Jones, J. Lewis & P. Quintas (Eds) The new management reader (New York, Routledge), 238–254.
  • Huxham, C. & Vangen, S. (2000) Ambiguity, complexity, and dynamics in the membership of collaboration, Human Relations, 53(6), 771–806.
  • Ilgen, D. & Hollenbeck, J. (1991) The structure of work: job designs and roles, in M. Dunnette & L. Hough (Eds) Handbook of industrial and organizational psychology (2nd edn) (Palo Alto, CA, Consulting Psychologists Press), 165–208.
  • Jaskyte, K. (2005) The impact of organizational socialization tactics on role ambiguity and role conflict of newly hired social workers, Administration in Social Work, 29(4), 69–87.
  • Jehn, K. A. (1997) Affective and cognitive conflict in work groups: increasing performance through value-based intragroup conflict, in: C. K. W. De Dreu & E. Van de Vliert (Eds) Using conflict in organizations (Thousand Oaks, CA, Sage), 87–100.
  • Kanter, R. M. (1994) Collaborative advantage, Harvard Business Review, 72(4), 96–108.
  • McLaughlin, M. W. & Talbert, J. E. (2001) Professional communities and the work of high school teaching (Chicago, The University of Chicago Press).
  • Nelson, T. & Slavit, D. (2007) Collaborative inquiry among science and mathematics teachers in the USA: professional learning experiences through cross-grade, cross-discipline dialogue, Professional Development in Education, 33(1), 23–39.
  • Reese, D. J. & Sontag, M-A. (2001) Successful interprofessional collaboration on the hospice team, Health & Social Work, 26(3), 167–175.
  • Rizzo, J. R., House, R. J. & Lirtzman, S. I. (1970) Role conflict and ambiguity in complex organizations, Administrative Science Quarterly, 15, 150–163.
  • Schein, E. H. (2004) Organizational culture and leadership (3rd edn) (San Francisco, Jossey-Bass).
  • Vangen, S. & Huxham, C. (2003) Nurturing collaborative relations: building trust in interorganizational collaboration, Journal of Applied Behavioral Science, 39(5), 5–31.
  • Yun, S., Takeuchi, R. & Liu, W. (2007) Employee self-enhancement motives and job performance behaviors: investigating the moderating effects of employee role ambiguity and managerial perceptions of employee commitment, Journal of Applied Psychology, 92(3), 745–756.

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